Aperçu de la rédaction

Qui sont-ils
Un magazine numérique basé à Berlin qui se spécialise en journalisme explicatif et collaboratif avec les lecteurs
LIEU
Berlin, Allemagne
ANNÉE DE CRÉATION
2014
ANNÉE DE LANCEMENT DU PROGRAMME D’ADHÉSION
2015
NOMBRE DE VISITEURS UNIQUES MENSUELS
474 755
NOMBRE DE MEMBRES
13 676
POURCENTAGE DES REVENUS ISSUS DES ADHÉSIONS
86 %

Rico Grimm, rédacteur en chef du Krautreporter, et Leon Fryszer, responsable éditorial, sont souvent appelés “les spécialistes des sondages”. En effet, les sondages font partie intégrante de presque toutes les activités de la rédaction, qu’il s’agisse de solliciter des idées d’articles, de recueillir des commentaires sur un produit, de faire appel aux connaissances du public ou de trouver des experts sur certains sujets. Tous les membres de l’équipe sont responsables de la rédaction et de l’utilisation des sondages et ont été formés à réaliser des synthèses et une segmentation de base pour éclairer leur travail éditorial.

En 2019, M. Grimm et M. Fryszer ont cartographié l’ensemble de leur cadre d’enquête, depuis les types de sondages qu’ils réalisent jusqu’au type de résultats obtenus par chacun d’eux. Ils ont examiné comment les enquêtes peuvent être utilisées comme méthode de croissance et ont même identifié les limites de ces sondages. Ils ont ensuite rassemblé tout cela dans un guide stratégique, dont le MPP parle ici.

Pourquoi est-ce important

Krautreporter a supprimé toute approximation dans la conception des sondages.

Lorsqu’elles sont bien réalisées, les enquêtes font remonter de nombreuses connaissances et ressources, notamment des pistes pour des articles, l’expertise des membres et des commentaires sur les produits.

Mais intégrer les commentaires des membres du public de manière aussi poussée que le fait Krautreporter peut rapidement submerger une rédaction si le processus n’est pas modélisé. Les pratiques de sondage de Krautreporter sont remarquables non seulement pour la qualité des informations qu’elles fournissent aux journalistes, mais aussi pour leur caractère systématique et régulier. Comme l’a constaté le MPP, ce qui devient routinier devient culture. Si vous voulez remettre vos membres au centre de votre projet, vous avez besoin d’un processus pour les soigner régulièrement.

Du point de vue des membres, répondre à une enquête est l’une des formes les plus simples de participation. Elle est précieuse en soi mais elle peut aussi être le premier pas vers un plus grand engagement. Vous avez toujours besoin de personnes pour vous aider en répondant à une enquête ou en se prêtant à un entretien. Si quelqu’un vous demande “Que puis-je faire à part donner de l’argent ?”, la réponse la plus simple est généralement “Dites-nous ce que vous pensez de ceci” ou “Répondez à ce sondage”.

Ce qu’ils ont fait

À tout moment, Krautreporter mène trois à cinq sondages pour recueillir des informations sur des produits ou l’expertise de ses membres sur un sujet spécifique. Avec huit journalistes salariés, cela signifie que la moitié de la rédaction pose des questions au public à un moment donné. Ils restent simples, basés sur des modèles créés par l’équipe sur Typeform. En 2019, ils ont voulu prendre du recul et ont cartographié chaque type d’enquête qu’ils mènent, en identifiant le pourquoi et le comment de chacune.

Le résultat a été le Engaged Journalism Playbook, soutenu par le Centre européen de journalisme, qui partage toute leur méthodologie, de la conception de leurs sondages à l’évaluation des résultats. L’outil d’enquête préféré de Krautreporter est Typeform, principalement parce qu’il peut être facilement complété sur mobile et qu’il s’intègre bien à leurs autres outils comme Airtable. Le MPP a rassemblé quelques-uns des points forts ci-dessous.

Les votes sur les sujets d’articles : utilisez des sondages pour demander à votre public de voter pour le sujet qui l’intéresse le plus. Les résultats de cette enquête permettront d’orienter la couverture éditoriale et les tactiques d’engagement autour du sujet le plus populaire. Un sondage “Votez pour un sujet” de Krautreporter comprend cinq options de sujets qu’ils pourraient couvrir et invite les membres à dire à Krautreporter lequel les intéresse le plus. Lorsque Krautreporter publie un article sur le sujet le plus populaire, il y a un cycle d’engagement intégré : “Nous avons demandé, voici comment vous avez répondu, et voici comment nous avons répondu.”

Exemple : la journaliste Susan Mücke écrit une rubrique intitulée “Un manuel pour la vie de tous les jours”. Pour chaque article, elle crée deux sondages : l’un où elle recueille les questions auxquelles les lecteurs veulent une réponse et le second où elle laisse les lecteurs voter sur les questions qu’elle a recueillies.

Un sondage à propos de l’angle : parfois, le personnel demande simplement aux lecteurs : quelles sont les questions que vous vous posez sur le sujet X ? Les réponses peuvent les aider à déterminer l’angle à adopter pour un sujet vaste.

Exemple : M. Grimm a procédé ainsi lors de ses recherches sur le bitcoin. Il a reçu plusieurs questions spécifiques de la part du public, mais aussi des commentaires tels que “Je ne sais même pas par où commencer”, ce qui a montré à M. Grimm que le public se sentait dépassé et confus par la crypto-monnaie en tant que sujet général. Ces commentaires lui ont montré qu’il devait d’abord écrire un article expliquant ce qu’était le bitcoin.

Un sondage pour collecter les expériences et connaissances du public : les journalistes ont souvent du mal à identifier les personnes qui peuvent humaniser un article. Kautreporter demande alors aux membres s’ils ont eu des expériences avec un sujet qu’ils couvrent.

Exemple : en réponse à un post dans le groupe Facebook de Krautreporter sollicitant des idées d’articles, un membre a écrit : “Je veux comprendre pourquoi les gens mangent de la viande même s’ils savent que les animaux souffrent”. Theresa Bäuerlein, la rédactrice en chef, a posé cette question aux abonnés de sa newsletter (chaque journaliste de Krautreporter a sa propre newsletter) grâce à un sondage Typeform. Mme Bäuerlein a reçu environ 200 réponses et les a classées par catégorie, ce qui est la façon dont Krautreporter synthétise généralement les réponses aux enquêtes. Elle a remarqué que cinq réponses revenaient sans cesse, elle s’est donc concentrée sur ces cinq raisons de manger de la viande dans son article. (Pour en savoir plus sur cet article particulier, consultez le site Nieman Lab.)

Demandez au public son expertise : votre public pourrait s’adresser à votre rédaction pour demander des conseils sur la meilleure façon de faire quelque chose, comme trouver un emploi ou étudier pour un examen. Krautreporter demandera alors à ses membres de répondre aux questions d’autres membres, puis établira une liste vérifiée des meilleures réponses.

Exemple : leur liste d’autrices sélectionnées par les membres

Demandez aux membres ce qui leur tient à cœur : Krautreporter reconnaît qu’il ne sait pas toujours quelles sont les informations les plus pertinentes pour ses lecteurs. Parfois, l’équipe interroge les membres pour savoir s’ils s’intéressent à un sujet particulier.

Exemple : avant les européennes de 2019, Krautreporter a sondé les membres sur les cinq domaines politiques sur lesquels ils voulaient connaître les opinions des candidats. Les résultats leur ont donné une feuille de route claire pour leur couverture des élections : analyser la position de chaque parti sur les cinq principaux sujets. Ils ont partagé ce processus avec les lecteurs.

Les résultats

En plus de répondre à des questions spécifiques aux articles et d’informer les décisions éditoriales immédiates, les sondages aident également Krautreporter à développer une vision général des intérêts de ses membres et des raisons pour lesquelles ils lisent ou soutiennent le média, ce qui permet de les comprendre en tant que segments, plutôt que comme un monolithe.

Lors d’un entretien avec l’équipe de recherche, M. Grimm et M. Fryszer ont décrit les segments d’audience de la manière suivante :

Très engagé : le top 1 %, les “super membres” qui “commentent les articles, répondent à tous les sondages… nous connaissons leur nom.”

Quelque peu engagé : environ 9 % de leur public ; les personnes qui “participent à une conversation lorsqu’elles ont quelque chose à dire.” Selon M. Grimm, ces lecteurs commentent rarement en ligne parce qu’ils ne veulent pas que leur nom apparaisse… ils n’ont aucune envie de se disputer.” Mais lorsqu’ils se trouvent dans un espace sûr, comme un sondage, et qu’ils connaissent un peu le sujet, ils s’engagent.

Les autres : les 90 % restants de leur public, les personnes qui sont attachées à la marque, mais qui sont membres surtout pour avoir accès au journalisme (Krautreporter est payant). Il y a aussi un groupe de membres qui lisent rarement et qui “veulent juste être là”.

Ce qu’ils ont compris

Les sondages mènent à une croissance de l’engagement avec les membres. Krautreporter a constaté que dans les quatre semaines qui ont suivi la réalisation d’une enquête, les membres qui y ont participé ont eu tendance à augmenter leur fréquence de lecture. Ce résultat a surpassé les autres efforts d’engagement de la rédaction.

Les sondages sont un outil de fidélisation. Krautrerporter a constaté que les lecteurs qui participent à au moins un sondage restent membres pendant environ quatre mois de plus que ceux qui n’y participent pas. D’autres canaux de communication montrent des tendances similaires, mais plus faibles.

Les sondages peuvent compléter votre analyse d’audience. Comme beaucoup d’éditeurs web le savent, il est difficile d’obtenir une vision holistique de vos audiences en utilisant uniquement les indicateurs d’analyse classiques. Les sondages permettent à l’équipe de compléter sa compréhension des différents segments d’audience, tout en offrant aux journalistes l’occasion de vérifier leurs hypothèses sur ce que veulent ces segments de lecteurs.

Apprentissages-clefs et points de vigilance

Les sondages peuvent être intégrés à tous les stades du processus éditorial. Au Krautreporter, on demande aux journalistes s’ils prévoient de réaliser des sondages auprès des membres avant même de commencer à travailler sur un article.

Les sondages sont un excellent moyen de mobiliser les membres du public les plus timides. La plupart des membres du public ne souhaitent pas s’engager dans des forums publics, mais ils apprécieraient de pouvoir participer au processus de manière moins visible. N’oubliez pas de tenir compte des segments d’audience les plus discrets.

Partez du principe que vous n’atteignez pas les membres peu engagés avec les sondages. Il est difficile de faire parvenir des enquêtes à des personnes qui ne sont pas déjà engagées, du moins par vos propres canaux. Krautreporter reconnaît qu’il s’agit d’une lacune importante. Pour combler ce manque, vous devrez faire preuve de créativité dans votre diffusion, peut-être en demandant à une autre organisation de partager l’enquête ou en la publiant dans d’autres forums publics, comme un groupe de voisinage.

Autres ressources

Note : le MPP a soutenu un autre projet de Krautreporter en 2019 à travers son programme de bourses, Membership in News Fund.